Une date, une histoire : Pu Yi devient empereur de Chine à l'âge de trois ans

Publié le par Spike

http://www3.findagrave.com/photos250/photos/2004/119/8698818_108325134254.jpgAixinjueluo Puyi (né à Pékin le 7 février 1906 - mort à Pékin le 17 octobre 1967), connu sous le nom de Puyi également orthographié Pou-yi ou P'ou-yi mais appelé également de son nom de règne Xuantong, est le douzième et dernier empereur de la dynastie Qing, qui régnait alors sur la Chine, et par conséquent le dernier empereur de Chine. Il est le fils de Zaifeng deuxième prince de Chun, deuxième fils de Yixuan premier prince de Chun, lui-même septième fils de l'empereur Daoguang. Il est né dans la trente-deuxième année du règne de l'empereur Guangxu.

 

Biographie


Le dernier empereur (1908-1912)


À 30 ans Guangxu étant toujours sans enfant, sa tante Cixi, l'impératrice douairière de Chine et détentrice réelle du pouvoir, nomme par décret Puyi pour assurer sa succession. L'enfant a alors 2 ans et 10 mois.

Au lendemain de cette nomination Guangxu décède. Le surlendemain, c’est Cixi elle-même qui rend l'âme.

L'intronisation officielle de Puyi se déroule le 2 décembre 1908; son père assure la régence.

À l'époque la Chine connaît alors de nombreux désordres, et depuis longtemps la dynastie Mandchoue est contestée (cf : révolte des Taipings au siècle précédent, révolte des Boxers de 1899 à 1901, mouvements insurrectionnels du Guangdong et du Guangxi entre 1905 et 1911).

Le général Yuan Shikai, nommé pour mater les mouvements de révolte, et notamment le soulèvement de Wuchang du 10 octobre 1911, se retourne contre le pouvoir en place et pousse le jeune empereur à abdiquer le 12 février 1912, mettant fin à la dynastie Qing et à la période féodale.


Prisonnier dans la Cité interdite (1912-1924)

Malgré la proclamation de la République de Chine le 1er janvier 1912, donc quelques jours avant sa destitution de jure, il obtient du gouvernement de pouvoir conserver son titre et demeurer dans la Cité interdite. En outre, il bénéficie d'une liste civile conséquente.

En 1917, un général conservateur partisan des Qing, le général Zhang Xun, profitant du désaccord du Président de la République et de son Premier Ministre quant aux puissances à soutenir dans le conflit européen de la Grande Guerre, envoie ses troupes à Pékin, soit près de 5 000 hommes. Le 1er juillet 1917, il rétablit Puyi dans sa fonction d'empereur, ce qui suscite une réaction unanime des républicains et des seigneurs de guerre. Le 13 juillet de la même année, Duan Qirui, le Premier Ministre démis, pousse Puyi à abdiquer de nouveau.

Dès 1919 Puyi commence à obtenir une éducation occidentale de son précepteur, un écossais diplômé d'Oxford, Reginald Johnston (en), officier du bureau colonial britannique parlant le mandarin et féru d'histoire ainsi que de poésie chinoise. Johnston n’est pas vraiment un enseignant, mais exerce une grande influence sur Puyi. Sous sa conduite, ce dernier s’intéresse à tout ce qui vient d'Occident (grâce à lui, il apprend l'anglais dès l'âge de 13 ans), au point de demander à Johnston de l’aider à lui trouver un nom anglais. Parmi la liste des noms de souverains anglais que lui procure Johnston, Pu Yi choisit celui de Henry. C'est encouragé par l'éducation de Reginald Johnston que Puyi coupe sa natte, symbole du pouvoir mandchou (voir article sur les Taipings qui coupèrent leur natte en signe de protestation contre le pouvoir en place).

 

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Le prince mondain (1924-1932)

En 1924, dans la tourmente qui entoure le renversement du Président de la République Cao Kun, les accords passés sont annulés. Puyi est expulsé de la Cité interdite, enceinte dont il n'était pas sorti depuis 15 ans, par les troupes de Feng Yuxiang. Il retourne dans le palais paternel.

Il tente, par le truchement de Reginald Johnston, de s'expatrier en Angleterre. Mais, pour ne pas froisser la Chine, les Britanniques lui refusent tout visa. Il se tourne alors vers l'Empire du Japon qui, en 1925, accepte de l'accueillir dans l'enclave de Tianjin. Là il vit une vie mondaine dans les milieux occidentaux des concessions.


Empereur du Mandchoukouo (1932-1945)



Les Japonais convoitent les richesses de la Mandchourie (fer et charbon, notamment), et à ce titre préservent Puyi, en qualité de représentant de la dynastie mandchoue qui avait encore ses fidèles.

En 1931, le Japon fait la conquête de ce territoire, et crée un état fantoche sous le nom de « Grand État mandchou (ou Mandchoukouo) de Chine ». Malgré les protestations du Guomindang auprès de la Société des Nations, et les déclarations de cette dernière qui considérait que le Mandchoukouo faisait partie intégrale de la Chine, les Japonais placent Puyi à sa tête en 1932, mais sans lui donner de pouvoirs réels.

Le Japon, soucieux de jeter des bases durables sur le sol chinois, met alors en place un vaste plan d'émigration vers le Mandchoukouo de populations japonaises et coréennes - la Corée ayant été annexée par le Japon depuis 1910 - le but étant de faire venir un million de personnes en 20 ans. Cet afflux de migrants se fait aux dépens des populations locales qui se voient dépossédées de leur terres.

Fort occupé à combattre l'influence grandissante du Parti communiste chinois de Mao Tsé-toung, le Guomindang finit par signer un cessez-le-feu avec les Japonais en 1931.

En 1932, la Société des Nations module ses positions quant au problème mandchou en déclarant, que « ... le nouvel état créé est un protectorat plutôt qu'un véritable état indépendant », même si elle préconise l'adoption d'un plan d'intervention internationale pour la Mandchourie (de ce fait, le Japon quitte la SDN le 27 mars 1933).

Puyi veut regagner son titre d'empereur ; c'est une quasi obsession. Aussi, en octobre 1933, quand le Japon en quête d'une image moins conquérante et d'une certaine légitimité lui fait la proposition de reprendre son titre impérial, il accepte malgré les innombrables victimes de guerre chinoises, et la dépossession des terres au bénéfice des émigrants nippons et coréens.

Le 1er mars 1934, Puyi, sous le nom de « Kangdle », est sacré Empereur pour la troisième fois.

Puyi espère que cette intronisation n'est qu'une étape, et qu'une victoire du Japon en fera de nouveau l'Empereur de toute la Chine.

Toutefois, les exactions japonaises dans le pays, ainsi que l'influence de celle qui sera sa deuxième concubine, Tan Yuling, une Chinoise d'origine mandchoue, amène Puyi à s'affirmer devant ses « amis » japonais et à s'opposer à eux. Aussi, pour resserrer les liens entre l'Empereur et ses alliés un mariage est-il célébré en 1938 entre l'un des frères de Puyi, Pujie, et la princesse Hiro Saga, parente de l'Empereur Hirohito. Au cas où Puyi viendrait à disparaître sans descendance, Pujie porterait le titre impérial. Mieux encore, un enfant mâle issu de ce mariage, donc de sang mêlé chinois et nippon, ferait un Empereur idéal pour le Mandchoukouo. Pujie et Hiro Saga ont bien un enfant, mais c’est une fille. Quant à Tan Yuling, elle décède en 1942, à l'âge de 22 ans. Puyi, qui lui porte une réelle affection, aura toujours un doute sur la cause de ce décès sachant qu'elle était soignée par un médecin japonais.

Le Guomindang s'alliant au Parti communiste chinois contre l'envahisseur nippon, Puyi n'a d'autre solution que continuer à appuyer les Japonais. Son sort est lié au leur, et à l'issue de la guerre, non pas celle qui oppose simplement deux pays d'Asie, mais celle qui embrase le monde entier.

Le 17 août 1945, deux jours après la capitulation du Japon, Puyi abdique pour la troisième fois.

Afin d'assurer sa sécurité, les Japonais l'invitent à s'envoler pour le Japon. L'avion atterrit à Shenyang et Puyi est arrêté par les Soviétiques. Très probablement a-t-il été livré aux Russes par ses protecteurs, bien que ce point n'ait jamais pu être prouvé.


Prisonnier des Soviétiques (1945-1950)


Le 19, Puyi se retrouve en résidence surveillée à Tchita, dans le sud de la Sibérie, puis à Khabarovsk.

En août 1946, il est entendu comme témoin au Tribunal militaire international de Tokyo, dont le but est de juger les criminels de guerre en Asie. De témoin à accusé la distance est mince, mais Puyi sait se préserver. À l'issue de son audition, qui dure 7 jours, le Guomindang demande son extradition vers la Chine, ce que refuse l'Union Soviétique qui soutient le Parti Communiste Chinois.

En Chine le conflit qui oppose les nationalistes aux communistes tourne à l'avantage de ces derniers. Pressentant le pire, et craignant pour sa vie s'il devait retourner en Chine, Puyi demande à Staline à rester définitivement en Union Soviétique, mais sa lettre demeure sans réponse.

La République populaire de Chine est proclamée à Pékin le 1er octobre 1949 par Mao Tsé-toung. Quelques mois plus tard, au début de 1950, Mao en voyage en URSS demande l'extradition de Puyi, et des autres dignitaires mandchous exilés avec lui, vers la Chine. Staline accepte.


La rééducation (1950-1959)

Puyi est transféré dans le « camp de rééducation pour criminels de guerre » de Fushun, sous le matricule 981. La guerre de Corée éclate en septembre 1950. Quelques mois après, et du fait de la proximité de Fushun avec la frontière sino-coréenne, Puyi est transféré dans un autre camp à l'intérieur du pays où il reste deux ans. En 1954, quelques mois après la fin du conflit coréen (27 juillet 1953), il retourne au camp de Fushun.

Une enquête est diligentée sur place en vue d'un procès éventuel. Accablé par les confessions de ses amis et de sa famille, Puyi est reconnu coupable de nombreux crimes contre le peuple chinois et le PCC, au premier chef figurant la conspiration avec le Japon.

Puyi rédige alors une confession dans laquelle il fait amende honorable, ce qui lui vaudra la clémence du « Grand Timonier » qui optera pour sa « rééducation » plutôt que pour son exécution.

Un peu plus tard, en septembre 1959, Mao Tsé-toung décrète l'amnistie de certains criminels de guerre, dont Puyi.

 

Un chinois comme les autres (1959-1967)

Commence une nouvelle vie pour Puyi. Pour le nouvel an de l'année 1960, Zhou Enlai le convoque et, comme le raconte son demi-frère cadet, Puren, dans le film "Puyi. The Last Emperor of China" (cf infra), le premier ministre lui suggère d'écrire le livre de sa vie. Il lui trouve également un travail de jardinier au jardin botanique de Pékin.

Quelque temps plus tard, c'est Mao Tsé-toung lui-même qui le reçoit, et qui lui conseille également de rédiger son histoire. Mais en plus, il lui préconise de se remarier.

Ces conseils sont suivis. En avril 1962, Puyi se marie avec une infirmière, Li Shuxian, et la confession de Fushun sert de base au livre qui sort en 1964, sous le titre "La première moitié de ma vie". Ce livre est traduit dans de nombreuses langues. En France il est édité par Flammarion sous le titre "J’étais empereur de Chine". Il faudra attendre 2007 pour que paraisse la version intégrale, la précédente ayant été expurgée de 160 000 mots[réf. nécessaire].

Puis, il devient bibliothécaire au sein de la « Conférence consultative politique du peuple chinois » avec un salaire de 100 yuans par mois, avant de devenir lui-même membre de cette institution en 1964, et ce jusqu'à sa mort.

La révolution culturelle vient troubler cette quiétude : ses revenus sont réduits, son mobilier en partie confisqué. Mais il évite l'humiliation publique, comme le pratiquaient couramment les gardes rouges.

Peu après ses médecins diagnostiquent un cancer des reins et de la vessie.

 

Décès et Sépulture

À l'aube du 17 octobre 1967, Aixinjueluo Puyi meurt. Vingt-huit ans plus tard en 1995, sa veuve Li Shuxian, transfère ses cendres afin qu'il soit enterré près de son prédécesseur, l'Empereur Guangxu, parmi les tombes de l'Ouest de la dynastie des Qing.

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